Interview d’Anne & Andreas U. – La Liberté

témoignage

Anniversaire » Le lecteur en Liberté

Originaire d’Allemagne, Andreas a découvert la ville de Fribourg dans le cadre de ses études en théologie.
Une année d’échange durant laquelle ce passionné d’escrime de 47 ans a fait la connaissance de l’Arche de Fribourg
dans laquelle il s’est d’abord engagé en tant que bénévole avant de devenir responsable du foyer Grain de sel où il vit avec sa femme,
Anne, depuis 21 ans. Un anniversaire que le couple fête aujourd’hui, aux côtés de celles et ceux qui sont rapidement devenus leurs «amis».

Votre recette de kougelhopf fait des ravages paraît-il, d’ailleurs vous ne seriez peut-être pas ici sans elle…

Les membres de l’Arche hésitaient à m’accueillir car je ne savais que quelques mots de français en arrivant à Fribourg.
Il y avait alors une femme qui n’aimait pas les nouveaux, car leur arrivée signifiait le départ des anciens.
Après avoir goûté mon kougelhopf, elle a voulu que je vienne… et a convaincu les autres!

Vous dites avoir été surpris au début par la normalité de la vie avec les personnes en situation de handicap…

Mon travail consiste à les soutenir pour qu’elles aient une vie épanouie et la plus normale possible.
Nous partageons des activités du quotidien: nous mangeons ensemble, rions ensemble et nous traversons les moments difficiles ensemble.
Quoi de plus normal?

C’est la raison pour laquelle vous n’êtes pas très à l’aise avec les termes «éducateur» ou «assistant»?

Je travaille avec des personnes adultes, déjà éduquées. Si je suis «l’assistant», l’autre est-il «l’assisté»?

Avec votre épouse, vous parlez d’ailleurs de vos amis…

Ça correspond parfaitement à mon ressenti. Leur authenticité m’invite à des rencontres «de personne à personne».
Nous nous découvrons avec nos forces mais aussi avec nos faiblesses.
Nous nous acceptons et nous nous disons: «C’est bien que tu existes.»

Le monde du bénévolat a été ébranlé par la pandémie, qu’est-ce qui a changé pour vous concrètement?

En temps normal, des étudiants vivent et travaillent avec nous, mais avec les cours à distance beaucoup ne sont pas revenus à Fribourg.
Et avec les mesures sanitaires, la vie en communauté est forcément moins attractive.
Il y a donc quelques places libres pour des bénévoles actuellement…

Responsable du foyer, champion d’escrime, jardinier amateur… Vous trouvez encore le temps de nous lire?

Pas de déjeuner sans Liberté, ou presque!

Votre mot de la fin?

Amitié.

La Liberté, article du 1.10.2021 par AE

Amitié » La lectrice en Liberté

C’est en 1992 qu’Anne, 57 ans, fait la connaissance de l’Arche de Fribourg, une association qui accueille
dans le cadre familial de ses trois foyers des personnes en situation de handicap.
Huit ans plus tard, cette enseignante fait ce choix de vie radical:
s’installer avec son mari de façon permanente au foyer Grain de Sel pour partager le quotidien des résidents…
et vivre avec eux de beaux moments d’amitié.

L’Arche, c’est d’abord de belles rencontres, dont celle de votre mari grâce à ses petits soucis linguistiques…

Andreas (d’origine allemande, ndlr) s’était adressé à moi pour lui corriger des travaux en français.
Mais pas besoin de parler la même langue pour tomber amoureux, beaucoup vous le confirmeront…

Vous dites qu’il faut être bien dans ses baskets pour vivre avec des personnes en situation de handicap…

La plupart d’entre elles ont le don de mettre le doigt sur mes faiblesses et mes blessureset elles l’expriment souvent sans filtre.
Si je ne les ai pas acceptées, je ne peux pas rester longtemps en relation vraie avec elles.

Parmi ces faiblesses, votre malformation cardiaque qui vous a en quelque sorte reliée à elles, dites-vous…

La première chose qu’une personne en situation de handicap vous demande est:
«Est-ce que tu m’aimes?» sous-entendu: «comme je suis».
Avec mon handicap, cette question a souvent été la mienne à l’intérieur.

Vous vivez non pas «pour» les personnes accueillies mais «avec» elles. Qu’entendez-vous par là?

Lorsqu’on se retrouve ensemble pour boire un café, il n’y a pas les «assistants» à une table et les personnes «accueillies» à une autre.
Bien sûr les personnes accueillies ont besoin d’un accompagnement mais nous sommes surtout là
pour vivre des relations d’amitié, de fraternité et devenir meilleur au contact de l’autre.

Vous n’êtes, votre mari et vous, pas les seuls lecteurs de La Liberté au foyer Grain de Sel…

Chaque cahier a ses intéressés, celui des Sports en particulier…
Dès son réveil, Olivier, fan de Gottéron, va chercher La Liberté dans la boîte.
Comme je ne partage pas forcément sa passion, pas de conflit!

Olivier qui, paraît-il, demande à tout le monde: «Et toi, qu’est-ce qui te manque?»

J’ai envie de vous poser la question: et vous, Anne, qu’est-ce qui vous manque?

Je suis comblée! Mais ce serait prétentieux de dire qu’il ne me manque rien. La sérénité, peut-être…

Un mot de la fin?

Plutôt un titre: Va où ton cœur te porte!

La Liberté, article du 30.9.2021 par AE